Système de sécurité pour armes à feu par M. félix fontenau (de Nantes).

London 1851 - Innovations (techniques, transport ...)
Avatar du membre
worldfairs
Site Admin
Messages : 10916
Enregistré le : 21 juin 2004 09:41 pm
Localisation : illkirch
Contact :

Système de sécurité pour armes à feu par M. félix fontenau (de Nantes).

Message par worldfairs »

Les accidents que les journaux viennent d'enregistrer coup sur coup et dus au défaut de précaution que l'on apporte trop généralement dans le maniement et l'usage des armes à feu, nous font un devoir de faire connaître une découverte qui est destinée, par les avantages qu'elle présente, a détrôner les vieux systèmes et à rendre très-rares, pour ne pas dire impossibles, les chances d'accidents.

systeme_securite_armes_a_feu.jpg
systeme_securite_armes_a_feu.jpg (211.51 Kio) Vu 471 fois

Jusqu'ici, les améliorations introduites dans la construction des armes à feu, avaient eu principalement pour objet de perfectionner les moyens de destruction du gibier; celle dont nous nous occupons est infiniment plus intéressante, à notre avis, puisqu'elle est destinée à rendre moins dangereux pour l'homme l'usage du fusil.

Les accidents qui viennent si souvent désoler les familles, peuvent être ramenés à deux catégories principales; les uns sont causés par la rupture des
canons (nous n'avons pas ici à nous occuper de ceux là) les autres plus fréquents sont dus, il faut être juste, autant à l'imprudence de leurs auteurs ou de leurs victimes qu'a la défectuosité des systèmes le plus généralement appliqués à la construction des armes.

Il faut bien le dire, à sa justification, le chasseur le plus expérimenté, qui, en entrant dans une maison, dépose son fusil, parfaitement désarmé, hors de la portée du premier venu, croit avoir pris toutes les précautions que réclame sa prudence; hélas! il comptait sans son mauvais destin; l'arme glisse, tombe et part! Eût-il poussé la prévoyance jusqu'à retirer.

ses capsules, la moindre parcelle de poudre fulminante, égarée sur l'orifice de la cheminée, peut dans les mêmes circonstances, déterminer l'explosion.

Franchit-il une haie vive, un fossé? la plus petite branche, soulevant la tête du chien, nonobstant les mille et un crans de sûreté, dont l'effet n'est mal heureusement pas infaillible ; amène le même déplorable résultat? En un mot, nous n'en finirions pas si nous (levions passer en revue les innombrables causes d’accidents.

M. Félix Fontenau, de Nantes, a eu la bonne fortune de découvrir un nouveau système, dont la merveilleuse simplicité remédie à tous les inconvénients signalés.

Représentons-nous donc, comme l'indique la ligure ci-jointe, un chien de fusil dont le marteau, posé cylindriquement, est muni d'un pas de vis, dans lequel est introduite une cheville en acier pouvant s'élever et s'abaisser à volonté; le moindre tour imprimé à cette vis établissant un vide entre la tète du chien et la cheminée rend l'arme chargée aussi inoffensive qu'un fétu de paille. — On ne saurait douter de ce merveilleux résultat quand on a assisté aux expériences qui ont eu lieu, en présence des amateurs d'armes les plus distingués et des arquebusiers les plus notables de France et de l'étranger.

M. Fontenau a encore complété son système par l'emploi d'une nouvelle cheminée, qui peut être adaptée isolément.

La Société S encouragement saisie de l'examen de cette découverte, a fait connaitre son opinion dans le rapport suivant fait par M. Ch. Laboulaye, au nom du comité des arts mécaniques :
« Le comité des arts mécaniques nous a chargé de vous rendre compte d'une invention de M. Félix Fontenau, de Nantes, résultat de travaux auxquels il s'est livré pour améliorer les armes à percussion, et surtout pour éviter les affreux accidents qui chaque année, lors de la saison des chasses, viennent affliger tant de familles.

« Pour atteindre ce but, M. Fontenau rend mobile, à volonté, la partie cylindrique du chien qui vient, dans l'arme à percussion ordinaire , frapper sur la cheminée munie de la capsule. Celte mobilité est obtenue en forant cylindriquement cette partie du chien et y taraudant un pas très-fin qui permet d'y adapter une vis. Cette vis, terminée extérieurement par une tête cannelée, se détourne avec facilité; un demi-tour suffit pour désarmer le fusil et rendre toute explosion impossible , lors même que par un accident quelconque le chien s'abattrait sur la cheminée.

« On voit avec quelle facilité le chasseur se trouve mis à l'abri de tout accident, avec quelle rapidité le fusil est remis en état de faire feu.

« En enlevant entièrement la vis, l'arme devient tout à fait inoffensive et peut sans danger être maniée par les enfants et les personnes imprévoyantes.

« Il était impossible de remédier, par une disposition plus simple, aux dangers qu'offre le maniement des fusils à percussion ; les dispositions compliquées portant sur des combinaisons diverses de pièces de batterie qui ont été imaginées jusqu'à ce jour ne peuvent soutenir la comparaison avec cette ingénieuse invention, qui n'offre aucun des inconvénients qu'on pouvait leur reprocher.

« Mais, si M. Fontenau a rendu un service important à l'humanité, il a encore accompli un progrès très-remarquable au point de vue industriel.
C'est ce qu'on appréciera facilement en étudiant les inconvénients que fait reconnaître l'expérience dans le mode de construction employé aujourd'hui.

« Dans toutes les armes construites jusqu'à ce jour, le chien, par un choc brusque, frappe sur l'extrémité de la cheminée; il s'attache à celle-ci des débris de cuivre qui forcent à la nettoyer, quelquefois des parcelles de poudre fulminante qui peuvent devenir des causes d'accidents; la cheminée est ébranlée par une percussion irrégulière qui a lieu beaucoup au-dessus du pas de vis qui l'assemble avec le canon , et le chien est souvent cassé par le choc; enfin, celui-ci posant sur l'extrémité de la cheminée, le cuivre des débris de la capsule peut être chassé latéralement et blesser la personne qui se sert de l'arme, accident dont il n'y a que trop d'exemples.

« Tous ces inconvénients si notables auxquels on est étonné qu'on n'ait pas encore trouvé moyen de porter remède disparaissent par l'emploi de l'heureuse disposition due à M. Fontenau.

« La vis est disposée de façon qu'il n'y a entre elle, lorsqu'elle est descendue, au point le plus bas qu'elle puisse atteindre, et le bout de la cheminée que l'épaisseur du cuivre d'une capsule. Il en résulte que le choc est seulement suffisant pour écraser la poudre fulminante et faire éclater la capsule ;conséquemment la vis ne fait plus emporte-pièce sur la cheminée, et le cuivre ne peut plus pénétrer dans celle-ci.

<< Ote-t-on la capsule, la poudre fulminante qui resterait sur la cheminée ne peut.plus faire explosion, car la vis ne peut opérer aucune pression sur ces restes.

« Indépendamment de ce que la vis, dans ce système, ne frappe pas directement sur la cheminée, il faut ajouter que le bout de cette vis étant en acier ne peut jamais se refouler au contact de la capsule.

« Tout crachement latéral de la poudre fulminante et des éclats de capsule si funestes aux chasseurs est supprimé : cela résulte de ce que le chien, reposant sur l'embase de la cheminée, opère une fermeture qui met obstacle à tout éclat ou crachement latéral ; une ouverture pratiquée à la partie antérieure permet la sortie des gaz.

« Enfin le chien n'est pas sujet à se casser, car non-seulement il ne tombe pas avec excès de force, mais il tombe d'aplomb. Or, nous avons entendu évaluer à 100,000 fr. par année les remplacements de chiens de fusil cassés dans l'armée; en tous cas, il est certain que c'est un article important des dépenses qu'exige l'entretien des armes.

« Nous n'hésitons pas, messieurs, à déclarer que M Fontenau, en remplaçant par un ajustement de précision, dans une partie essentielle des armes à feu, une disposition imparfaite et pleine d'inconvénients, a réalisé un progrès important qui mérite toute votre approbation. L'artillerie se hâtera sans doute d'expérimenter ce perfectionnement, et, malgré difficulté de modifier un matériel assujetti à la condition de la plus grande simplicité, elle pourra, nous croyons, tirer un utile parti des travaux de M. Fontenau.

Quant aux armes de chasse, nous pensons que la Société d'encouragement doit s'associer à la propagation d'une invention qui se recommande au double point de vue de l'humanité et du progrès industriel.

Déjà, au reste, tous les fabricants d'armes de Liège et de Saint-Étienne, nos plus habiles armuriers de Paris, MM. Lefaure, Baucheron, Lepage-Moutier, Delebourse, etc., adaptent ce procédé à leurs plus belles armes et ont saisi avec empressement le moyen que leur offrait M. Fontenau de réaliser tous les avantages que nous vous avons énumérés
ci-dessus.

« En conséquence, votre comité des arts mécaniques à l'honneur de vous proposer :
1° De remercier M. Fontenau de son intéressante communication ;
2° D'insérer dans votre Bulletin, le présent rapport, et d'y joindre la description et la gravure du chien et de la cheminée de son invention.

Article repris du Journal Illustré de L’Exposition de 1851



Retourner vers « Londres 1851 - Innovations (techniques, transports...) »